| 
 | 
  Je peins pour visualiser l’intériorité. Pour exorciser ces
images invisibles, issues d’une mémoire enfouie. L’image cède la place à ce qui
 est montrable. Si l’image apparaît trop, elle anéantit le voyage infini de la
 peinture.
 
 La peinture doit faire oublier la représentation. Cet équilibre est ma
 recherche : que montrer, que faire disparaître… Des couches qui se succèdent en
 laissant toujours un souvenir de ce qu’il y eut. Un brouillard sur la mémoire,
 les choses sont floues, comme si je n’y avais pas accès moi-même.
 
 Etre vu, pas vu…Le temps de voir, de laisser les choses apparaître. La volonté
 d’insister. L’histoire racontée par des passages, des détours. Du collage en
 combat avec la peinture, un rythme à trouver, une existence pour les deux.
 Fixer un instant de l’expression émotionnelle, la matérialiser. Arriver à la
 représentation parfaite, quête impossible.
 
 On pourrait reconnaître mais aussitôt être absorbé par la peinture elle-même,
 matières, couleurs, vibrations, là où chacun peut se retrouver librement. Le
 plaisir même de peindre, comme un besoin incontournable. Le plaisir du pinceau
 qui pose et qui arrache la peinture pour laisser voir. L’impression parfois
 d’être dans un rituel intérieur, de gestes qui se répètent frénétiquement sans
 pouvoir les contrôler. Un sentiment archaïque d’être proche de l’essentiel.
 
 Chaque peinture est un recommencement, comme si la précédente n’avait laissé
 aucun acquit ou contrôle, pour la suivante. Les anciennes peintures murales,
 possèdent souvent cette richesse, du temps qui passe et le souvenir de ce qui
 fut. Recherche sans fin…Mais où je laisse chaque fois un morceau de moi-même.
 |